Dans la vallée de l’Udon, Carrouges est un petit château provincial cerclé de douves. Son style architectural témoigne encore des différentes époques qui l’ont marqué. Transmis par alliance du XIIe au XXe siècle, son histoire est le reflet des siècles qu’il a traversé.
Un petit château sur la colline
Le premier château de Carrouges était installé sur une colline. Possédé par les ducs de Normandie, le château est ensuite légué à la famille de Carrouges au XIIe siècle. Sa position stratégique en fait un enjeu de discorde entre les comtes d’Anjou et les ducs de Normandie. Au XIVe siècle, les Carrouges décident donc de faire déplacer le château. Il est ainsi transféré sur son site actuel. Au cours de la guerre de Cent Ans, Robert de Carrouges rejoint d’abord le camp anglais avant de se rallier aux Français. Sa fille, Jeanne, épousera Robert de Cagny. En 1424, la fille du couple s’allie à Jean Blosset, proche de Louis XI. Le roi sera accueilli au château de Carrouges en 1473, alors qu’il fait halte sur sa route qui le conduit en pèlerinage au Mont-Saint-Michel.
L’embellissement de Carrouges au fil des siècles
Sans hériter, Jean Blosset lègue la propriété du château à sa sœur Marie, femme de Philippe Le Veneur. C’est ensuite Jean Le Veneur, proche du roi François Ier, qui hérite du château. Avant 1533, il fait bâtir le châtelet d’entrée, en utilisant un mélange de briques et de granit. Tanneguy Le Veneur, lieutenant général de Normandie, devient le prochain propriétaire du domaine. Apprécié par Catherine de Médicis, il la recevra dans son château en 1570. Sous sa direction, l’aile des grands appartements est construite. Un gros pavillon en bastion armé de canonnières vient également s’ajouter à l’ensemble architectural. Au XVIIe siècle, c’est au tour de l’aile de la galerie de fermer le terre-plein arrosé par les douves.
Les déboires d’une famille
Tanneguy II Le Veneur, à la tête du château de Carrouges, négocie l’union d’Henriette de France, la sœur de Louis XIII, avec Charles Ier d’Angleterre. Il s’installe ensuite sur sa terre de Tillières. Entre 1637 et 1653, l’abbé Jacques Le Veneur fait réaménager les appartements. S’ensuit une période d’excès qui plonge la famille dans la tourmente. François Le Veneur, petit-fils de Tanneguy, aura six filles, toutes contraintes de devenir religieuses au Couvent de la Visitation d’Alençon où elles sont placées. Au XVIIIe siècle, les Le Veneur se lancent une nouvelle fois dans des travaux d’envergure alors qu’ils font refaire l’aile qui mène à l’entrée avec un portail de style classique. Alexis Le Veneur devient propriétaire du château peu avant la Révolution française. Il s’engage au côté des révolutionnaires et se rallie ensuite à Bonaparte avant de devenir député. En 1810, il est nommé vicomte. Carrouges restera entre les mains de ses descendants jusqu’en 1936. Depuis, le château appartient à l’État qui a entrepris une rénovation en profondeur de la propriété mal entretenue.
Sur la terrasse du château de Carrouges
Au sud-ouest du domaine, il est possible d’accéder aux parterres de broderies depuis la terrasse du château. Là, entre deux imposants piliers de pierre, une grille veille à l’accès. Cette grille est décorée par des bouquets de fer où sont dessinées des volutes au style baroque, œuvre d’Isaac Geslin au XVIIe siècle. La réalisation s’inspire d’un dessin du sculpteur Jacques Croisil.