Entre Saint-Malo et Cancale, le quartier de Rothéneuf renferme un lourd secret. Lourd par le poids, il s’agit des rochers sculptés de Rothéneuf. Découvrez comment le rêve d’un abbé a façonné à jamais ces rochers du littoral breton !
Un rêve gravé dans la roche
Ce sont des centaines de personnages dont les visages pétrifiés sont balayés par le vent du rivage. Face à la mer, en Bretagne, les rochers sculptés de Rothéneuf sont nés du rêve de l’abbé Adolphe Julien Fouéré. En 1894, cet abbé s’installe à Rothéneuf. Il a derrière lui un long parcours de recteur au sein de nombreuses paroisses bretonnes. À l’époque, le territoire ne fait pas encore partie de Saint-Malo. Victime d’une attaque cérébrale, l’abbé devient sourd et muet. En quête de nouvelles façons de s’exprimer, il a l’idée de sculpter des rochers sur la côte bretonne. Muni de son marteau et de son burin, jour après jour, il façonne des visages sur le littoral.
Le résultat d’une passion de 14 ans
L’abbé Fouéré se dévoue à cette nouvelle passion pendant 14 ans. Du granit émergent de nombreux personnages. Certains sont des saints, d’autres des créatures mythologiques. La plupart d’entre eux rendent hommage à la richesse du folklore breton. Au total, plus de 300 rochers sculptés sont ainsi répartis sur 500 mètres carrés de falaises. Et pourtant, l’abbé, guidé par sa seule passion, n’avait jusqu’alors aucune connaissance technique ou artistique ! Se découvrant une nouvelle raison de vivre, son travail de la roche ne lui suffit pas. Chez lui, l’abbé-artiste continue en sculptant le bois. Dans la région, on le surnomme déjà l’ermitage de Rothéneuf. Sans autre moyen de communiquer avec les autres, il se renferme dans cette passion libératrice. En 1907, une nouvelle attaque survient. Déjà fortement affaibli, l’abbé est contraint d’arrêter son activité de sculpteur. Il meurt en 1910. Mais son héritage artistique lui, lui a survécu depuis. Pour le plus grand bonheur des Bretons et de tous les visiteurs de passage en Ille-et-Vilaine !
Un patrimoine d’exception et fragile
Taillée dans le granit, l’œuvre de l’abbé Fouéré n’est pas si robuste qu’on pourrait le croire. Sa fragilité est due à l’exposition des éléments naturels ainsi qu’au développement touristique du site. En 2010, une association est créée pour prendre en charge ces rochers uniques et les protéger d’une érosion grandissante. Un siècle après la mort du sculpteur, Les Amis de l’œuvre de l’Abbé Fouéré voit ainsi le jour. Cette association est également en charge des visites commentées du site et des autres manifestations culturelles dédiées à la mémoire de l’abbé Fouéré. Pour continuer à présenter l’œuvre surprenante de cet artiste autodidacte, des travaux de rénovation sont également entrepris. Au départ, l’abbé avait peint certains de ces rochers. Une partie de l’œuvre d’origine est d’ores et déjà perdue. Mais il reste possible de sauver le reste ! Et continuer ainsi de fasciner les générations à venir en leur présentant sous une facette originale les saints et mythes de Bretagne.